Nous interviewons aujourd'huii Willy Braun, fondateur du blog Brocooli.com, et organisateur du premier Startup Week-end à Toulouse.
Bonjour Willy, vous éditez Brocooli.com, un blog sur les startups, l'accompagnement, et bien plus, pouvez-vous nous le présenter ? Qu'est-ce qui vous donne envie de vous exprimer ?
J'ai lancé Brocooli.com il n'y a pas si longtemps puisque le blog fêtera bientôt ses 4 mois. Au début, je voulais en faire une plate-forme multi-auteurs assez généraliste, et développer avec mon frère, Brice, l'aspect entrepreneuriat/innovation.
Au final, les contributions extérieures sont encore rares et le blog tend à se concentrer assez naturellement sur nos sujets de prédilection. Nous sélectionnons les meilleurs vidéos que nous rencontrons sur le web (talks et interviews principalement), résumons nos lectures et nous exposons notre vision d'un domaine, d'un secteur ou d'une évolution.
Pour couvrir un maximum de thématiques, nous avons segmenté le blog en 4 parties.
- La première partie s'attache au concept de l'entreprise ; elle abrite la majorité des contenus. Il n'y a pas vraiment de règles éditoriales, nous abordons surtout les transformations de l'entreprise, les business models innovants et les spécificités web. On essaie d'intégrer autant que possible des notions académiques et des théories qui nous séduisent, avec si possible les textes originaux ou les vidéos de présentation.
- Une seconde partie traite plus généralement de l'Homme et était initialement baptisée "coaching". Elle regroupe des articles sur la communication, l'alimentation, le sommeil et la psychologie.
- La troisième partie est plus globale, elle est baptisée "penser le monde", les sujets abordés ont une portée plus large comme l'éducation, la créativité. On y retrouve également des comptes rendus de conférences ou d'événements que nous couvrons pour le blog. Nous essayons de privilégier l'innovation et les transformations dans ce qui nous entoure.
- Enfin, la quatrième partie permet d'intégrer des ressources brutes, souvent des extraits de livres ou des textes classiques, en économie ou en littérature, glanés pour la plupart sur wikisource.
Pour résumer, Brocooli, est une sorte de blog d’expression et de curation. Nous rédigeons des billets, sélectionnons, synthétisons et critiquons des contenus (lectures, vidéos).
Vous organisez également les Startup Week-ends Toulouse, la dernière édition a eu lieu il y a exactement un mois, qu'est-ce que les participants retirent de cette expérience ?
Je suis effectivement à l'initiative du premier Startup Weekend à Toulouse qui a eu lieu fin novembre. Le principe d'un Startup Weekend est de rassembler une centaine de personnes d'horizons différents (marketing, finance,informatique, droit, graphisme, etc.) pour monter un projet en un week-end. Tout au long du week-end, les participants sont coachés par des experts et des entrepreneurs aguerris et présentent le dimanche après-midi leurs avancées (une sorte de "business plan de combat") à un jury d'entrepreneurs et d'investisseurs.
Le but est vraiment de créer une expérience d'entrepreneuriat en accéléré pour échanger au maximum avec des gens expérimentés et sortir du champ théorique. La devise du mouvement est d'ailleurs "No Talk, All Action".
Les participants retirent principalement 4 bénéfices :
- un avant-goût de l'entrepreneuriat, une expérience (laconique) de création et d'innovation avec du travail en équipe, une réflexion pour accoucher d'un modèle économique viable et si possible disruptif, la création d'une maquette de produit (application ou produit physique) et d'un site web (avec parfois un début de confrontation au marché avec des tests adwords),
- de nombreuses rencontres, associés potentiels, investisseurs, entrepreneurs, experts...
- une visibilité (le long du week-end étaient présents des blogueurs et une équipe de journalistes),
- des feedbacks très sérieux pour les porteurs de projets et une expérience de pitch (avec le premier pitch le vendredi soir pour présenter en une minute son idée, puis une présentation de vingt minutes devant le jury).
Je ne saurais trop vous inviter à tenter l'aventure.
L'entreprenariat vous intéresse visiblement : pensez-vous entreprendre ? Où en serez-vous dans cinq ans ?
L'entrepreneuriat me passionne, je crois même qu'il s'impose à moi. Chaque nouvelle découverte me conforte dans cette voie où toute chose est à bâtir. Je crois que pour entreprendre, il ne faut pas forcément penser "outside the box", mais au sein d'un ensemble de contraintes qui font sens, l'essentiel étant de bouger les murs, voire de les agrandir.
Il me paraît complexe de me projeter dans 5 ans, je crois que je m'y refuse en partie car je trouve une beauté dans l'imprévu (s'il est des choses prévisibles). En tous cas, j'espère réaliser un maximum, apprendre beaucoup, quitte à "échouer" parfois, rencontrer de nouvelles personnes qui sauront me faire avancer. Je prête un grand pouvoir aux rencontres.
Surtout, dans 5 ans, je souhaite faire quelque chose qui me captive, et j’espère avoir une répercussion positive sur ce qui m'entoure.
Vos références sont souvent américaines : peut-on entreprendre en France ? Aujourd'hui plus qu'hier ? Moins que demain grâce aux technologies ?
Je crois que mes références sont très souvent américaines principalement pour trois raisons.
La première provient de la culture de l'entrepreneuriat, beaucoup plus développée aux Etats-Unis qu'en France, avec de nombreux investisseurs, entrepreneurs qui écrivent sur leur expérience et leur vision de l'entreprise. En France, les livres sur l'entreprise -hors traductions- me paraissent plus rares et proviennent en grande partie (du moins ceux que j'ai eu l'opportunité de lire) du monde académique (avec notamment de très bons manuels).
La seconde concerne plutôt le contenu vidéo, et relève de la qualité des pitchs des anglo-saxons. Je ne saurais pas expliquer rigoureusement la cause de cet écart, mais il suffit de tomber sur un TED Talk (vous me rétorquerez certainement que les orateurs ne sont pas pris au hasard...) pour saisir l'impressionnant talent des américains (et plus généralement des anglo-saxons) à transmettre de l'énergie et subjuguer un auditoire, moi en premier.
Il est d'ailleurs intéressant de noter que les français, lorsqu'ils sont invités à présenter en Californie, font pâle figure, d'un strict point de vue du "show", alors qu'ils sont pourtant eux-même exceptionnels (je pense notamment au talk d'Esther Duflo). Enfin, c'est je pense une sensibilité très personnelle au pragmatisme d'outre atlantique et leur envie affichée de changer le monde. Ils ont une ambition et une énergie grisantes.
En ce qui concerne les opportunités d'entreprenariat en France et les différences avec les Etats-Unis, je suis loin d'être un expert mais je me souviens de l'intervention de Jonathan Benassaya, co-fondateur de Deezer, à la Founder Conference. Il expliquait les avantages que nous avions ici, à savoir la présence de quelques super angels, la rapidité pour créer administrativement une entreprise, les nombreuses aides existantes (remboursement CIR, aides OSEO, JEI, etc.). Pour la création stricto sensu et les premiers financements la France ne paraît donc pas vraiment en-dessous, avec beaucoup d'aides du public (j'aime dire que le premier financeur des entrepreneurs en France est le pôle-emploi).
Je crois qu'en réalité en France, outre les pesanteurs culturelles autour de l'argent, le manque d'exits et un marché intérieur assez restreint en B2C (cela dépend naturellement du secteur, je parle surtout des startups), c'est principalement l'écosystème qui reste à consolider. Loïc le Meur est d'ailleurs récemment intervenu à ce sujet, au TechCrunch Remix. Il évoquait l'émulation exceptionnelle dans la Silicon Valley : à chaque instant, quelle que soit l'activité, il baigne dans un bain entrepreneurial et technologique. Il s'est appuyé sur l'incroyable florilège de réunions et meetings sur le sujet dans la Valley. Il existe même un rassemblement pour parler de ses échecs et échanger sur les leçons que l'on en a retirées !
Mais il me semble que l'écosystème entrepreneurial et de startups va vraiment dans la bonne direction en France, je rencontre et découvre chaque jour de nouvelles initiatives (l'ouverture de nouvelles Cantines, le camping, startupers.fr, etc.), les événements s'accélèrent (pour prendre l'exemple de Startup Weekend, les événements fleurissent dans chaque grande ville, 3 ont été réalisées à Paris, 1 à Toulouse et 1 à Marseille et sont prévus très prochainement des Startup Weekends à Nantes, à Lyon, à Nice, à Lille, un 4ème à Paris, un 2nd à Toulouse, on parle déjà de Bordeaux...). Le recrutement récent de nouveaux contributeurs sur Techcrunch France me parait également fort de sens et représentatif.
J'invite d'ailleurs toutes les personnes intéressées par les startups à creuser les réseaux et événements existants.
Enfin, concernant les technologies, je crois qu'il n'est plus à prouver toutes les opportunités procurées par l'émergence des technologies de la communication et de l'information. Nous pouvons raisonner de manière beaucoup plus libre, adopter un état d'esprit beaucoup plus proche de celui d'un architecte ou d'un designer pour imaginer des modèles économiques et ne se préoccuper de la réalité industrielle que dans un second temps.
Les technologies rassemblent également des acteurs de différents pays sur un même marché, plus directement et rapidement, avec certes un surcroit de concurrence mais également des opportunités de partenariats importantes.
Les technologies nous offrent une chance exceptionnelle : déséquilibrer le statu quo, réinventer les manières de produire, d'échanger et de communiquer, faire ce qui nous passionne, entreprendre.
Je serai ravi d'échanger sur les points développés, vous pouvez me contacter sur twitter (@willybraun), par mail (bonjour [a] willybraun.com) ou directement sur Brocooli.com. J'espère que vous y trouverez des outils qui vous seront utiles.